CROISIÈRE AUX GRENADINES

CROISIÈRE AUX GRENADINES

SKIPPER AUX GRENADINES

Au printemps 1983, le Comité d’Entreprise de SHELL France organise une croisière aux Grenadines de 14 jours avec deux voiliers. Une semaine avant le départ, Pierre, un ami toulousain qui travaille chez Shell et est partant pour l’aventure, m’annonce que le skipper de son bateau doit être hospitalisé et que le C.E. me propose de le remplacer. Avant de donner ma réponse, je vais voir Alain Grenier, directeur des sports de l’UPS qui a suivi toute mon évolution de « voileux » et qui a enseigné un an aux Antilles. Je lui explique mon projet, il me dit : «Je te connais, tu peux assumer cette responsabilité sans problème. La navigation là-bas est aisée, les Grenadines sont constituées d’un chapelet d’îles, orientées Nord-Sud abritées des alizés qui soufflent Est-Ouest, modérément à cette période de l’année.» C’est rassuré et confiant que j’accepte donc avec joie le poste.

Le circuit aux Grenadines

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : Le circuit dans les Grenadines

L’équipage sur chaque bateau se compose de huit adultes. Sur le nôtre : deux couples de Parisiens très sympas et quatre Toulousains : Pierre, son cousin, Claude et moi. Nous avons tous fait des provisions avant le départ et avons acheté une cantine de l’armée où s’entassent jambons entiers, saucisses de Toulouse, saucissons, pâtés, foie gras… Les parisiens se sont chargés des mets plus délicats : vins, champagnes, amuse-gueules, confitures…
Le jour J, les Toulousains prennent le train à 6h du matin pour Paris-Orly puis pour Fort de France. Dans l’avion, nous faisons connaissance et là je découvre que mes futurs équipiers ne connaissent pas grande chose à la navigation à voile, à l’exception de l’un d’entre eux qui a un petit cotre breton de 6m, basé en Bretagne. Je suis un peu déçu mais tous promettent de m’aider et d’être de bons matelots, ce qui s’est d’ailleurs avéré exact, tout au long de la croisière. Nous arrivons vers midi à la marina de Fort de France.

Fort de France

Jean Gaches - Skipper aux Grenadines : Fort de France

Là, nous prenons possession du bateau, un beau sloop de 12m. Je fais le tour du propriétaire et nous finissons l’avitaillement. Vers 17h, tout est en ordre. Je réunis l’équipage pour faire deux propositions. Aller passer la nuit dans un petit mouillage tranquille, près du port qui n’est pas très sympa ou partir pour une navigation de nuit vers Béquia, première escale de notre périple, à environ 70 miles, soit à peu près 12 h de navigation. La deuxième option fait l’unanimité.

Le skipper

Jean Gaches - Skipper aux Grenadines : le skipper
Vers 18h nous larguons donc les amarres. A la barre, je ne suis pas peu fier ! Mais…entre Fort de France et Sainte-Lucie, l’île la plus proche, il y a une distance de 20 miles. Or dans ce goulet les alizés s’en donnent à cœur joie… et la mer aussi. Avec la fatigue du voyage, le rangement à bord, l’inventaire, mon corps se laisse aller au mal de mer… grandeur et décadence ! Je confie alors la barre au breton tout en restant vigilant. Heureusement, à part moi, personne n’a été malade mais certains se sont posés des questions…en particulier ces dames qui, couchées dans leur cabine, se sont demandées avec quel rigolo, elles s’étaient embarquées.

Béquia

Jean Gaches - Skipper aux Grenadines : Béquia

Le lendemain matin, au lever du soleil, je retrouve mon énergie et le doute se dissipe, même chez la gente féminine. Avant 18h, heure à laquelle la nuit tombe aux Antilles, nous mouillons à Béquia, petit port de pêche, après avoir longé les magnifiques côtes de Sainte-Lucie ?

Puis direction plein Sud, où nous faisons des escales paradisiaques : Moustique (minuscule comme son nom l’indique), Canouan, Cayes Tobago à propos desquels voici un article tiré d’une revue sérieuse :

«Si vous naviguez aux Grenadines, les Tobago Cays sont un passage incontournable. Cette réserve protégée de cinq îles inhabitées est un véritable paradis sur terre avec poissons multicolores, eaux transparentes et chaudes et plages de sables blancs. Nagez avec les nombreuses tortues qui y ont élu refuge, dégustez des langoustes au barbecue et admirez la plus belle barrière de corail des Antilles

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : le bateauÀ chaque mouillage, nous retrouvons ces mêmes merveilles de la nature tout en faisant de la plongée tuba. Puis, c’est au tour de Petit Saint-Vincent, l’île la plus au Sud.

Jean Gaches - Skipper aux Grenadines : barriere de corail
Nous mouillons au large d’une plage flanquée de quelques cabanes de pécheurs et à l’extrémité de laquelle une vingtaine de barques, longues et effilées, équipées d’un puissant moteur hors-bord sont amarrées. Avec Claude, nous demandons aux pécheurs ce qu’ils attrapent. Des langoustes sur les hauts fonds de l’île de Grenade, toute proche, nous répondent-ils. Claude demande s’il peut les accompagner. Le lendemain à 7h,je l’amène à l’un des bateaux. Cinq minutes plus tard, la flottille démarre à fond la caisse. De leur côté, Pierre et son neveu vont faire un tour à terre. Je reste donc seul à bord et je ne résiste pas aux joies du nudisme. Claude revient vers 10h, ravi de son expédition. Il m’explique que les pécheurs plongent avec bouteilles, à 15 mètres de profondeur environ. Ils ont à la main 3 ou 4 baguettes, munies à une extrémité d’une boucle avec un nœud coulant, une sorte de lasso, qu’ils glissent autour des antennes de la langouste. Bien sûr, langoustes au rendez-vous pour le repas de midi !

Les langautes

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : le langaute C jean-gaches - Circuit aux Grenadines : le langaute C

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dans l’après-midi, je commence à avoir de petites démangeaisons mal placées qui augmentent irrémédiablement durant la journée. Je constate alors que mes attributs les plus intimes ont mal supporté leur mise à nu au soleil. Claude et Pierre constatent les dégâts et cherchent désespérément un adoucissant dans la pharmacie du bord… Ils finissent par trouver des tulles gras qu’ils placent avec d’infinies précautions et commentaires sur l’endroit martyrisé. Inutile d’ajouter qu’à partir de cet instant, les sous-entendus fusent : «Quelle perte à son âge ! Comment vont-elles ? Tu as été puni par où tu as péché ! Est-ce une perte ?»

L’escale suivante, rapide celle-là, est à Union et son enclos à requins. Sur le ponton, nous croisons Eric Tabarly avec sur ses épaules sa fille Marie, âgée de 9 ans.

 

Retrouvailles

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : les retrouvailles

Le même jour, nous nous arrêtons à la petite île inhabitée de Mayreau où nous retrouvons l’autre bateau Shell. Re Sur la plage, se trouve un gigantesque barbecue que nous utilisons pour faire des grillades.

C’est ensuite le retour plein nord avec seulement deux escales. La première aux Deux Pitons–un qui s’élève à 700m et l’autre à 500m. Entre les deux, nous apercevons la belle petite plage où se promène Bouba… un éléphanteau abandonné par un cirque !

Les Deux Pitons  et Mayreau

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : les deux pitons

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : mayereau

La seconde escale se déroule à Marigot Bay et son magnifique petit fjord.

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : marigot bay

Là, petite anecdote : après le souper, Claude notre précieux pécheur lance son moulinet et installe son matériel. Chaque fois qu’il fait cela, j’ai pris l’habitude de m’asseoir à ses côtés, le soutenant moralement. Au bout d’un moment, il me dit :«Jean prépare le poignard, je crois que c’est gros.» Puis quelques minutes plus tard : «C’est un gros, prend le trident !» Et pour finir : «C’est très gros, prend le fusil-harpon !» Chaque fois, je m’exécute, mais intrigué, je finis par saisir une lampe-torche et à sa lumière, je suis le fil de la ligne. Au bout d’une trentaine de mètres, je m’aperçois qu’il s’est accroché à l’amarre d’un gros yacht américain. Les américains mouillent en effet avec très peu de chaine mais une grande longueur de cordage, ce qui fait que le bateau oscille comme un pendule sous l’effet de la houle… Ce soir-là c’est sa plus grosse prise, malheureusement non comestible ! Mais cette anecdote me donne l’occasion de souligner que grâce au savoir-pêcher de Claude, notamment à la traine, nous avons eu la chance de savourer barracudas, mérous, dorades coryphènes on ne peut plus frais !

Jean Gaches - Skipper aux Grenadines - Claude le pêcheur

Le lendemain, nous sommes de retour à la marina de Fort de France. J’en profite pour consulter un médecin pour mes brûlures qui me prescrit quelques pommades qui accélèrent grandement ma guérison. En sortant de son cabinet, les autres m’attendent impatiemment. Je les revois comme si c’était hier, alignés en demi-cercle. Je leur dis : «Tout va bien…mais il faut que l’on fasse une quarantaine». À la vue de leurs têtes catastrophées, je ne peux garder mon sérieux et j’éclate de rire !

À midi, nous retrouvons l’équipage de l’autre bateau pour un repas d’adieu au restaurant. La majorité commande un bon bifteck/frites… le premier depuis 15 jours. Cette croisière fut une des plus belles qui m’a été de faire. Tout était réuni pour qu’il en soit ainsi : la navigation, les paysages, les fonds marins avec leurs coraux et poissons multicolores, la bonne ambiance à bord…
Les Grenadines ont hélas subi le dérèglement climatique, la pollution due aux gros yachts de plus en plus nombreux et à l’essor touristique. Beaucoup de coraux sont morts et nombre d’espèces de poisson ont disparu. Un vrai désastre écologique !!!

Jean Gaches - Skipper aux Grenadines - les poissons multicolores des Grenadines

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : poisson multicolore

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : poisson multicolore

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : poisson multicolore

jean-gaches - Circuit aux Grenadines : poisson multicolore

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